Dans une interview à une chaîne arabe,
le ministre fait état d’un début de détente régionale.
Charles Rizk : La première démarche sera
la désignation d’un procureur international
pour accélérer le lancement du tribunal.

Alors que les négociations en vue de la formation d’un tribunal à caractère international semblent s’accélérer, le ministre de la Justice, Charles Rizk, en a expliqué les grandes lignes, hier, dans une interview accordée à la chaîne satellitaire arabe al-Jazira.
M. Rizk a commencé par saluer la rapidité avec laquelle le Conseil de sécurité a accepté la formation d’un tribunal à caractère international. Ce qui, selon lui, est une première car, en général, la mise en place de tels tribunaux est très lente.
M. Rizk a aussi précisé que le Liban a présenté une demande en ce sens au Conseil de sécurité après l’aval de toutes les parties politiques, et en moins de deux mois, le tribunal a accédé à sa demande. « Nous attendons maintenant la visite à Beyrouth d’une délégation du secrétariat général des Nations unies pour entrer dans les détails », a ajouté le ministre de la Justice.
Pour M. Rizk, la première décision sera de nommer un procureur général international qui recevra du magistrat Serge Brammertz les conclusions de son enquête et accélérera la publication de l’acte d’accusation ainsi que le début du procès.
En réponse à une question, le ministre de la Justice a affirmé qu’il ne craignait pas vraiment l’émergence de divergences entre le Liban et le secrétariat des Nations unies. « Mais nous devons rester vigilants pour éviter certains dérapages. Au ministère de la Justice, nous avons pris toutes les précautions pour cela », a-t-il ajouté.
M. Rizk a précisé que la communauté internationale a accepté le fait que le droit libanais soit appliqué au niveau de ce tribunal, tout en exigeant certains amendements, notamment au sujet de la peine de mort, et de l’adoption d’un second degré d’instance. En d’autres termes, le tribunal sera à deux niveaux, et après un premier jugement, les parties pourront faire appel. Ce qui augmente les garanties pour le déroulement d’un procès équitable.
Le ministre de la Justice a précisé que le Liban pouvait facilement accepter ces deux amendements. Et dans ces conditions, le tribunal devra siéger dans l’un des pays qui abritent sur son territoire un siège de l’ONU. Quant au financement de ce tribunal, le ministre a estimé que le Liban devrait s’en charger.
Selon M. Rizk, ces grandes lignes devraient figurer dans l’accord qui sera conclu entre le Liban et l’ONU au sujet de ce tribunal. Il a affirmé être entré hier en contact avec le représentant du secrétaire général des Nations unies au Liban M. Geir Pedersen, dans le but d’accélérer les démarches, et ce dernier lui aurait promis de faire de son mieux.
Au sujet du blocage actuel du dialogue sur les deux derniers points, le ministre de la Justice a précisé qu’il s’agit en fait de deux crises en une, et elles se résument au fait qu’une partie du contentieux est purement libanaise alors que l’autre dépend des développements de la région. « Le Liban, a-t-il dit, est l’un des pays qui dépendent de son environnement en raison de la composition démographique et confessionnelle de son tissu social. Nous devons tenir compte de ce fait et faire de notre ouverture sur notre environnement une richesse et non un handicap, une source de force et non une faiblesse. »
Le ministre de la Justice a toutefois exprimé un optimisme prudent sur la situation régionale. Il a expliqué que les tensions dans le processus du dialogue reflètent aussi en partie des tensions régionales et internationales. Mais selon lui, le climat général actuel semble se diriger vers une certaine détente. « Il existe deux grandes forces qui s’affrontent dans la région : la première est dirigée par les États-Unis, qui ont une présence militaire d’Irak jusqu’en Afghanistan, et une autre menée par l’Iran et regroupant la Syrie et, depuis les dernières élections dans les territoires occupés, l’Autorité palestinienne. Elle est aussi présente en Irak. Or, aujourd’hui, ces deux grandes forces ont amorcé un début de dialogue, notamment au sujet de l’Irak. »
Le ministre de la Justice s’est empressé d’ajouter que ce début de dialogue pouvait tourner court, mais il pouvait aussi se développer. « C’est pourquoi nous devons être prudemment optimistes. Car ce climat de détente ne peut qu’avoir des répercussions positives sur le dossier libanais », a-t-il ajouté. « Si ce climat se précise, certaines solutions pourront être trouvées sur le plan interne. Sinon, à Dieu ne plaise… » a conclu M. Rizk.

L'Orient Le Jour.

Charles Rizk

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