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Le Liban Aujourd'hui
23 mars 2006

Le Dialogue

La prochaine séance reportée au lundi 27
« pour davantage de concertations ».
Les chefs s’attaquent enfin au plat de résistance :
la présidence de la République.

le_dialogue221Comme prévu, le troisième round de la conférence nationale de dialogue a fait long feu hier, sans que cela ne signifie pour autant que les participants aient effectivement échoué dans leur débat sur la présidence de la République. La séance d’hier, qui a quand même duré quatre heures, a en fait constitué une sorte d’entrée en matière, aussi bien pour la reprise du dialogue en soi que pour un début du règlement de la question présidentielle.
Une bonne partie de la séance a donc été consacrée à une mise en commun, qui devient un passage obligé pour rétablir la dynamique de groupe lorsque les chefs se retrouvent après une interruption de quelques jours. D’autant que ces interruptions sont toujours rythmées par les déclarations tonitruantes de certains d’entre eux qui ne font pas toujours bon ménage avec le climat de trêve qui devrait en principe régner durant une assemblée des chefs. Le problème réside peut-être dans le fait qu’il ne s’agit pas tout à fait d’une trêve, mais d’une collaboration dans la concurrence entre les différents leaders, ou d’une continuation de la bataille politique par d’autres moyens – en l’occurrence le dialogue – que par les escalades verbales.
Quoi qu’il en soit, la séance a débuté à 11h 30 (en présence de tous les concernés à l’exception du député Ghassan Tuéni, pour des raisons de santé) dans un climat tendu, en raison de la poursuite des polémiques à travers les médias sur la présidentielle. Une « séance de vérité », durant laquelle chacun a clarifié ses positions, s’est de facto imposée pour détendre quelque peu l’atmosphère.
Dans ce cadre, certains participants à la table de dialogue, notamment le chef du Courant du futur, Saad Hariri, auraient réagi aux propos tenus mardi par le chef du Courant patriotique libre, le général Michel Aoun, concernant les « Rustom Ghazalé de l’argent et du féodalisme politique qui se trouvent à la table de dialogue ». Le député de Beyrouth aurait ainsi indiqué au leader du CPL qu’il appréciait très peu la comparaison avec l’un des noms qui sont liés à l’assassinat de son père, Rafic Hariri, et que ce genre de discours échappe, à son avis, au politique. Ce à quoi Michel Aoun aurait répondu que son accusation était de nature politique et qu’il ne voulait pas viser quelqu’un personnellement.
De son côté, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, aurait adressé certains reproches aux participants concernant la question du troc entre la présidence et les armes du Hezbollah, estimant qu’il ne met aucune condition rédhibitoire concernant la question de l’arsenal de la Résistance.

La « crise de pouvoir »
Les participants ont ensuite longuement évoqué la question présidentielle, comme l’avait promis le président de la Chambre, Nabih Berry, qui a d’ailleurs mis l’accent sur le fait qu’il respectait ses engagements.
Le débat aurait d’abord porté sur la question de la notion de « crise de pouvoir » et le CPL aurait réitéré sa conception des choses à ce niveau, à savoir que le problème ne réside pas uniquement au niveau de la présidence de la République, mais qu’il touche les rapports entre les différentes institutions. Le CPL a ainsi repris à la table de dialogue l’argumentation développée dans le dernier communiqué du Bloc du changement et de la réforme, et selon laquelle la majorité est « temporaire » dans la mesure où le Conseil constitutionnel, paralysé, n’a toujours pas pu examiner les dix recours en invalidation contre des députés de la majorité qui lui ont été présentés. Une vision des choses que les leaders de la majorité, notamment Samir Geagea, auraient déplorée hier, dans la mesure où elle remet en question la légitimité acquise par les urnes et le droit de la majorité à gouverner, puisqu’elle donne à la minorité le droit de renverser la majorité. Le camp du 14 Mars a par ailleurs considéré que le fait que toute la réunion ait été axée sur la présidence de la République constitue une victoire pour le 14 Mars, dans la mesure où le débat sur la « crise de pouvoir » s’est, dans les faits, limité à la première magistrature de l’État. Ce qui prouve, selon le 14 Mars, que la crise de pouvoir ne porte pas sur les relations entre les institutions, comme l’affirment le CPL ou le Hezbollah, mais bel et bien sur la présidence de la République.
Les chefs ont ensuite commencé à échanger leurs points de vue sur la question présidentielle, notamment sur le mécanisme qu’il faudrait suivre pour résoudre cette question. S’adressant à Samir Geagea, Nabih Berry aurait ainsi fait allusion aux propos du patriarche maronite, Mgr Nasrallah Sfeir, selon lesquels le recours à la rue est inenvisageable.
Il se serait dégagé de la discussion une certaine divergence de points de vue sur la démarche à adopter. Le camp du 14 Mars, notamment Samir Geagea et Saad Hariri, aurait mis l’accent sur la nécessité d’en finir avec la question de la présidence et l’urgence de remplacer Émile Lahoud dans les plus brefs délais. De leur côté, le général Aoun et Hassan Nasrallah auraient mis en évidence leur préférence pour l’élaboration d’une feuille de route, d’un consensus, que le nouveau président viendrait appliquer. Une proposition qui aurait été approuvée sur le plan du principe par le chef du Parti socialiste progressiste, Walid Joumblatt.
Quant aux députés Boutros Harb et Élias Skaff, ils auraient fait tous les deux des interventions remarquées sur les critères sur lesquels le choix du nouveau président devrait se fonder. M. Harb aurait réclamé l’élection d’un chrétien fort à la présidence puisque cela est possible, tandis que M. Skaff aurait proposé de commencer à discuter sérieusement des noms des candidats potentiels. Le général Aoun a proposé, dans ce domaine, que les candidats à la présidence, à commencer par lui-même, se retirent de la table de dialogue lorsque la question se posera « pour ne gêner personne ».

La conférence de Berry
À l’issue de la réunion, Nabih Berry a tenu une conférence de presse, en présence notamment du chef des FL, Samir Geagea, durant laquelle il a annoncé la suspension du dialogue jusqu’au lundi 27 mars.
« Heureusement, les prévisions de beaucoup de personnes qui pariaient sur le fait que le dialogue déboucherait sur une impasse sont tombées à l’eau. Le débat sur la question présidentielle a débuté, mais la question nécessite plus de discussions. Depuis le début du dialogue, nous avons dit que le processus avait été initié pour réussir, et non pour échouer, et c’est ce climat qui prévaut encore », a indiqué M. Berry, en direction des journalistes.
« Vous savez que les conférenciers ont abouti à des résultats positifs la fois dernière (...). Nous avons commencé la séance aujourd’hui par débattre la question de la présidence. Le débat était très franc. Il a été beaucoup plus franc que d’habitude, en raison de la sensibilité du sujet, mais tous les présents se sont caractérisés par leur sincérité. Le débat était profond (...) et, en fin de compte, nous avons réalisé que la question nécessite davantage de discussions, et peut-être aussi d’études politiques et non politiques. C’est pourquoi tout le monde s’est mis d’accord sur la nécessité de reporter la séance au lundi prochain, à 11h, pour davantage de concertations », a-t-il ajouté.
La majorité des participants qui ont pris la parole devant les journalistes à l’issue de la conférence – c’est-à-dire MM. Amine Gemayel, Mohammad Safadi, Saad Hariri, Michel Aoun, Boutros Harb, Élias Skaff, Hassan Yaacoub, Kassem Abdel Aziz, Jawad Boulos, Hagop Pakradounian, Nabil de Freige et Samir Geagea – a mis l’accent sur « le caractère positif » de la séance d’hier, qui a permis d’initier le débat sur la présidence de la République « sans tabous », selon Saad Hariri, qui a par ailleurs exprimé à nouveau sa volonté de voir Émile Lahoud s’en aller. Tous ont mis en relief la possibilité d’aboutir à des résultats dans les prochains jours sur la question présidentielle, reconnaissant que la séance d’hier a effectivement déblayé le terrain pour dégager une solution à ce problème.
Selon des sources bien informées, les quelques jours de repos d’ici à lundi devraient donner aux participants la possibilité de mener des contacts entre eux, ainsi qu’avec les milieux diplomatiques concernés, pour pouvoir restreindre la liste des candidats à la présidence à deux ou trois noms.

L'Orient Le Jour.

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